Dans le but de répondre aux enjeux de transformation digitale actuels des directions financières des entreprises, la facture électronique va peu à peu s’imposer, en France mais aussi en Europe.
La loi de finance fixe l’obligation de la facture électronique dès 2024.
Revenons sur le cadre juridique de la généralisation de la facture électronique mais aussi sur ces implications.
Objectifs de la dématérialisation des factures
À travers la réforme de dématérialisation des factures, le gouvernement français poursuit un quadruple objectif.
Gain de productivité
La dématérialisation des factures a pour but de réduire les tâches administratives pour les entreprises. Ainsi, la réduction des délais de traitement des factures permettra un gain de productivité et de compétitivité. On estime aujourd’hui, l’économie liée au passage à la facture électronique à 4,5 milliards d’euros.
Simplification des déclarations
Ensuite, les rapports avec l’administration doivent être facilités par la dématérialisation des factures. En effet, la plupart des formulaires fiscaux et TVA seront préremplis grâce aux outils numériques.
Meilleure détection des fraudes
Ensuite, les rapports avec l’administration doivent être facilités par la dématérialisation des factures. En effet, la plupart des formulaires fiscaux et TVA seront préremplis grâce aux outils numériques.
Avoir une meilleure visibilité
Enfin, la dématérialisation des factures permettra d’avoir connaissance en temps réel de l’activité économique française.
Le calendrier de la réforme
Le gouvernement avance progressivement dans la mise en place de cette réforme importante.
La loi de finances de 2020 a prévu l’obligation pour toutes les entreprises assujetties à la TVA d’émettre des factures électroniques à leurs clients ainsi que de transmettre des éléments relatifs à ces factures à l’administration fiscale.
Initialement, la mise en place était prévue sur la période 2023-2025. Suite à l’ordonnance n°2021-1190 du 15 Septembre 2021, la période mise en place de la facture électronique est décalée à 2024-2026.
Ce déploiement progressif de l’obligation de dématérialisation des factures se fera progressivement selon la taille des entreprises pour l’émission de factures :
- Dès juillet 2024 pour les grandes entreprises;
- Dès janvier 2025 pour les entreprises de taille intermédiaire;
- Dès janvier 2026 pour les PME et les auto-entreprises.
Donc, à partir de 2026, toutes les entreprises devront dématérialiser leurs factures et transmettre les informations afférentes à l’administration fiscale.
En revanche,dès juillet 2024, toutes les entreprises devront être en mesure de recevoir des factures électroniques.
Le champ d'application
Le cadre réglementaire lié à l’obligation de facture électronique est très précis.
Qu’entend-on par facture électronique ?
On dénomme une facture électronique, une facture, crée, transmise, reçue et archivée sous format électronique. C’est l’ère du zéro papier.
Quelles sont les transactions concernées ?
La facture électronique sera obligatoire pour toutes les opérations réalisées entre des assujettis établis en France, dans le secteur B2B.
Il est précisé que les opérations exonérées de TVA mentionnées aux articles 261 à 261 E du CGI (secteurs du médical, de l’éducation, activités bancaires, assurances, etc.) seront toujours dispensées de facturation. Ces opérations ne sont par conséquent pas concernées par les obligations liées à la facture électronique.
Quels impacts dans la transmission des données à l’administration ?
Les entreprises se trouveront dans l’obligation de transmettre aussi :
- Les transactions avec des entreprises non établies en France
- Les transactions réalisées par un assujetti avec des non assujettis
Les assujettis auront l’obligation de communiquer à l’administration des données relatives aux mentions des factures qui ont été émises.
24 mentions obligatoires devront être communiquées lors de la première vague de déploiement comme les numéros SIREN, les numéros de TVA intracommunautaire, la catégorie de l’opération livraison de biens (LB) ou prestation de services (PS) ou double (LBPS), …
Puis d’autres mentions et données seront ajoutées au cours des déploiement.
Comment transmettre les données à l’administration ?
L’ordonnance n° 2021-1190 du 15 septembre 2021 relative à la généralisation de la facturation électronique met en place le dispositif de déclaration à l’administration. Elle dispose que pour remplir leur obligation de déclaration, les entreprises disposent de deux solutions distinctes.
D’une part, les entreprises peuvent se rendre sur la plateforme mise en place par l’administration. Il s’agit du portail public de facturation visé à l’article L2192-5 du code de la commande publique. Le portail Chorus Pro actuellement dédié à la facturation des personnes publiques devrait bénéficier d’une généralisation à mesure que la réforme progresse.
D’autre part, les entreprises peuvent choisir de travailler avec une plateforme de facturation partenaire de l’administration. Ces opérateurs sont immatriculés auprès de l’administration pendant 3 années renouvelables. Ce sont seulement ces plateformes agréées qui permettront de répondre à l’obligation légale de déclaration des factures dématérialisées.
Sanctions en cas de non-respect des obligations
Évoquer les sanctions pour non-respect des obligations de dématérialisation des factures relève de l’hypothèse. En effet, seul le texte de la réforme mettra en lumière le droit positif.
Or, à l’instar des réformes précédentes, il est probable que le refus de se plier à la réforme entraîne des sanctions financières. Le principe est souvent une amende forfaitaire à laquelle s’ajoute une pénalité par facture non déclarée.
Si l’administration réagit pour la présente réforme sur le modèle des précédentes, une marge de tolérance devrait être appliquée pendant les premiers temps d’application.
La sanction peut également être indirecte. Un comportement de mauvaise foi a pour conséquence d’attirer l’attention de l’administration fiscale. En effet, celle-ci considérera que l’entreprise contrevenante est susceptible de fraude.
Une réforme déjà en place en Europe
Force est de constater que la directive 2014/55/EU impose aux États membres de l’Union Européenne de transposer dans leur droit national l’obligation de dématérialisation des factures afin de lutter contre la fraude fiscale. En d’autres termes, la réforme amorcée par l’ordonnance de 2021 est avant tout une réaction à la directive européenne. Le Fonds de transformation de l’action publique participe au financement de la réforme.
En conséquence, certains pays européens ont de l’avance sur l’administration française et ont déjà mis en place dans leur droit interne des obligations de dématérialisation. L’Italie est citée par le communiqué de presse gouvernemental du 16 septembre 2021. L’instauration de la réforme au-delà des Alpes a été un franc succès.
La mise en place des règles de la réforme sera encadrée par un contrôle de l’Union européenne. Le Conseil constitutionnel sera probablement sollicité pour vérifier la conformité de la réforme à la directive sur le fondement de l’article 88-1 de la Constitution.
Se préparer au changement de réglementation
A compter du 1er Janvier 2024, certaines entreprises devront déjà franchir le pas.
La mise en conformité avec l’obligation de facture électronique est un effort important pour toute organisation. En effet, cela implique des modifications de paramétrage dans les logiciels comptables, de gestion commerciale ou de facturation. Par ailleurs, cela peut impacter les processus métiers.
Il convient donc d’anticiper.
Voici quelques conseils pour vous préparer :
- Réaliser un état des lieux de vos flux, de vos systèmes d’information et de vos processus qui seront impactés
- Actualiser les informations de vos fiches clients (SIRET, n° TVA communautaire)
- Privilégier l’envoi de facture digitale
- Veiller à la bonne application des mentions légales sur les factures
- Commencer à organiser les flux de gestion des achats selon la nature des factures d’achat
- Favoriser l’automatisation de l’enregistrement des factures d’achat en comptabilité avec des technologies comme l’OCR
Le report de 18 mois est une aubaine pour les entreprises pour mieux préparer ce changement et identifier les impacts aussi bien au niveau de la gestion de la TVA que sur les sujets de cohérence avec les liasses fiscales et de contrôle des flux.