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Le futur de la paie et de la rémunération : Qu’en est-il ?

J’aime à dire que la paye et la rémunération sont des métiers cousins. La paye évolue par la législation et la rémunération par les pratiques. Mais je pense qu’ils ont un avenir commun. J’ai sorti ma boule de cristal et je vous propose d’explorer ensemble mes prédictions sur le futur de la paye et de la rémunération sur deux volets.

 

Mais avant ça… une précision de taille s’impose.

 

La paye est un métier technique. La rémunération est un métier technique. Mais la paye et la rémunération ne sont pas le même métier. La paye demande de maîtriser la législation sociale, le droit de la sécurité sociale, le rôle et le fonctionnement des organismes sociaux. La rémunération consiste à établir des politiques (c’est-à-dire un ensemble de règles qui s’appliquent à tous et toutes) en matière de définition et d’évolution des salaires, le tout en adéquation avec la stratégie de l’entreprise et sa culture.

 

Maintenant que les bases sont posées explorons l’avenir…

Table des matières

S’adapter à la crise du pouvoir d’achat

En 2023 les entreprises ont fait des efforts pour soutenir le pouvoir d’achat des Français via des augmentations de salaires et des primes de partage de la valeur. Le cabinet Mercer rapporte que la médiane des augmentations générales était de 3% (contre 1,1% en 2022) et celle des augmentations individuelles de 2% (contre 1,4% en 2022). Deux records.

 

En cette fin d’année 2023 l’inflation ralentit enfin, mais pas assez vite ! Le climat social reste tendu et il faut de nouveau mettre la main à la poche pour éviter que les ménages soient durablement fragilisés. Au-delà des augmentations de salaire je prédis un bel avenir à certaines pratiques.

Revoir la fréquence des paiements des salaires

L’acompte sur salaire : difficile à demander et trop souvent refusé. Un sondage IPSOS paru en septembre 2023 met en avant que 18% des Français vivent à découvert. Et si au lieu de payer des Agios on demandait un acompte sur salaire ? Je vois déjà des sourcils se froncer dans certains services payes : verser des acomptes ça prend du temps et ça alourdit la charge de travail des équipes. Eh bien pas toujours ! Il existe maintenant des outils qui permettent de faciliter le traitement des acomptes, comme Rosaly par exemple. D’ailleurs je me permets un rappel pour la forme : il est interdit de refuser une demande d’acompte sur salaire.

 

Je pense aussi que l’éducation financière va prendre de plus en plus de place dans l’entreprise. Et je crois que l’on devrait apprendre ça bien plus tôt ! Mais je ne suis pas sûre qu’il reste de la place dans les programmes de l’éducation nationale.

Penser aux avantages flexibles

En Belgique des entreprises proposent des plans dit « cafétéria ». Chaque salarié·e peut choisir les avantages sociaux dont elle ou il a besoin en fonction d’un budget défini au même titre que le salaire fixe. Cela fait rêver, mais en France la législation ne permet pas d’aller aussi loin. Il existe tout de même des solutions comme la plateforme MAY qui propose aux salariés de ventiler certains avantages sociaux en fonction de leurs besoins : Titres-restaurant, titres-vacances, aide à la personne, sport, culture… Une bonne façon de gagner en pouvoir d’achat ! C’est aussi un excellent moyen de valoriser les avantages sociaux et ça ne serait pas du luxe !

Un meilleur partage de la valeur

En France le partage de la valeur n’a pas connu de réforme majeure depuis la mise en place de la participation et l’intéressement à la fin des années 50. En 2018, suite à la crise des gilets jaunes, le gouvernement a mis en place une prime exceptionnelle pour le pouvoir d’achat qu’on a appelé communément la prime Macron. Cette prime défiscalisée permettait de répondre à une double demande des salariés : soulager leur pouvoir d’achat et un meilleur partage des bénéfices de l’entreprise.

 

Depuis elle est renouvelée tous les ans. Dirigeant·e·s comme salarié·e·s apprécient beaucoup cette prime. Il faut dire que la défiscalisation est conséquente : pas de charges sociales (ni patronales ni salariales) et pas d’impôt sur le revenu. Mais trop de défiscalisation ce n’est pas bon à moyen terme.

 

Reste qu’il faut repenser le partage de la valeur en entreprise. C’est ce qu’une nouvelle loi va fortement encourager les entreprises à faire. À partir du 1er janvier 2025 toutes les entreprises de plus de 10 salariés devront prévoir un système de partage de la valeur. Cela va permettre de mettre sur la table des discussions ce qu’est la valeur et comment on la partage entre les actionnaires, les dirigeants et les salariés.

S’adapter aux nouvelles attentes

Plus de transparence

Depuis le confinement de Mars 2020, c’est une demande de plus en plus forte de la part des salarié·e·s et des candidat·e·s. Au printemps 2023, l’Union Européenne a voté une directive en faveur de plus de transparence sur les salaires. Exemple de sujet qui fait toujours débat : pour ou contre stipuler les salaires dans les offres d’emploi ?

 

Un sondage de Yougov montre que 40% des Français pensent que la transparence limiterait les écarts inexplicables et pousserait les employeurs à être plus justes.

 

Quoi qu’on en pense la transparence est en chemin. Le législateur Français a trois ans pour transposer la directive dans le droit national. On a un peu de temps, mais il faut commencer à y réfléchir dès maintenant. Prenons de l’élan avant de nous prendre des portes.

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Payer en cryptomonnaie

Je sais ce que vous êtes en train de vous dire. Vous êtes sceptique. Je comprends. Et pourtant cela arrive. Mieux : c’est déjà là.

 

Des entreprises qui évoluent dans le secteur du web3 utilisent déjà des cryptomonnaies pour rémunérer leurs équipes. Même en France. Pour le moment, il y a un vide juridique sur le traitement en paye. Laure Sassus Bourda, HR Manager chez Request Finance qui commercialise une suite d’applications pour aider les sociétés dans le web3 à gérer leurs cryptos, déclare ce qui est payé en crypto monnaie comme des avantages en nature pour ne pas trop fâcher l’URSSAF.

 

Cette demande est marginale aujourd’hui, mais elle va prendre de l’ampleur dans les années à venir à mesure que le web3 prendra de la place dans l’économie et que la défiance envers le système bancaire augmentera. Et la législation évoluera pour que le traitement en paye soit facilité

Vers l’avenir et au-delà …

Le futur de la paye et de la rémunération fait partie intégrante du futur du travail. Et celui-ci sera plus transparent, plus flexible, et plus juste. Du moins je le souhaite.

 

Pour se préparer à accueillir l’avenir il faut rester ouvert·e d’esprit et attentif·ve au monde qui nous entoure. Il faut aussi s’équiper des bons outils pour que l’on puisse se concentrer sur ce qui compte vraiment.

sandrine dorbes

À la rencontre de Sandrine Dorbes...

Experte en politique de rémunération.

Après avoir exercé son métier d’experte en rémunération au sein du CAC40, Sandrine DORBES créée son cabinet conseil How Much

Convaincue que la rémunération n’est pas une question d’argent, elle accompagne les dirigeants qui souhaitent mettre en place une politique de rémunération pertinente et efficace. 

Administratrice indépendante certifiée, elle s’intéresse également au lien entre le mode de gouvernance et le rôle donné à la fonction RH. Elle anime les ateliers “Aller à l’essentiel” et “Etre gratifié à sa juste valeur” auprès de la School of Life Paris.